De: Conseil de recherches en sciences humaines
Date de publication : 2013-03-26 12:00:00 | Date de modification : 2013-03-25 12:00:00
Imaginez que l’on puisse, en pénétrant dans votre cerveau, moduler vos habitudes de consommation ainsi que mesurer, dans un contexte de recherche d’emploi, votre capacité de résistance au stress ou votre capital d’agressivité. Science‑fiction? Au rythme où vont les avancées technologiques dans le domaine des neurosciences et, surtout, certaines de leurs applications, rien n’est moins sûr!
Les neurosciences, qui étudient la structure et le fonctionnement du système nerveux jusqu’au cœur du cerveau, suscitent un vif engouement, terrain fertile aux raccourcis dangereux. C’est ici qu’intervient la neuroéthique – un champ de recherche relativement récent –, qui s’intéresse aux questions morales liées aux neurosciences, notamment aux risques de dérive que présentent les technologies de neuro‑imagerie fonctionnelle.
« Ces technologies sont séduisantes, car elles permettent de reproduire l’activité du cerveau sous une forme visuelle que tout le monde pense comprendre, alors que ces images sont des reconstructions très simplifiées de la complexité du cerveau », prévient Éric Racine, bioéthicien dont certains travaux sont financés par le Conseil de recherches en sciences humaines.
« Par exemple, l’utilisation de l’imagerie cérébrale fonctionnelle par résonance magnétique est très complexe d’un point de vue technique, poursuit le chercheur. Il suffit que le sujet bouge ou collabore plus ou moins en pensant à autre chose de façon délibérée pour brouiller les résultats », explique‑t‑il. Toute interprétation des résultats s’avère donc très délicate, et il serait prématuré de penser les fournir en preuve devant les tribunaux, par exemple. Il y aurait là un risque de mettre en péril la justice et les procédures équitables pour un accusé.
Le potentiel des neurosciences est, d’un point de vue médical, indiscutable, mais les avancées spectaculaires rapportées dans les médias laissent parfois miroiter un miracle qui crée de fausses attentes. C’est aussi le rôle de la neuroéthique d’établir un équilibre entre les risques et les bénéfices qu’elles représentent pour le grand public.
Éric Racine, qui est titulaire d’un doctorat en sciences humaines appliquées et d’un postdoctorat en neuroéthique, est directeur de l’unité de recherche en neuroéthique à l’Institut de recherches cliniques de Montréal. Tout comme les chercheurs du National Core for Neuroethics de l’University of British Columbia, de la Dalhousie University, de l’University of Calgary et de l’University of Toronto, il fait partie des chercheurs qui permettent au Canada de jouer un rôle de chef de file dans cette discipline.