De: Conseil de recherches en sciences humaines
Date de publication : 2016-07-12 12:30:00 | Date de modification : 2016-07-12 12:30:00
Photo : Nain Community / Nunatsiavut / CC BY-NC-ND
Johannes Lampe vient d’être assermenté nouveau président du gouvernement régional du Nunatsiavut, à Terre-Neuve-et-Labrador.
Le Nunatsiavut est la première région inuite du Canada à s’être dotée de l’autonomie gouvernementale. Il a été créé en 2005, après la signature de l’Accord sur les revendications territoriales des Inuits du Labrador. M. Lampe, qui en est le troisième président, s’est engagé à définir une nouvelle orientation pour le gouvernement du Nunatsiavut. L’un des grands objectifs qu’il s’est fixés est de préserver et de revivifier la culture inuite du Labrador – et plus précisément, de promouvoir l’utilisation de la langue traditionnelle, l’inuktitut.
Johannes LampePrésident du gouvernement régional du Nunatsiavut
M. Lampe, un Inuit de la côte nord du Labrador, est d’avis que l’utilisation de l’inuktitut a connu un déclin rapide au fil des ans. Il croit que cela découle principalement de la réinstallation et de la marginalisation de bon nombre d’Inuits qui ont été dissuadés de parler leur langue maternelle. Les statistiques appuient cette perception. En effet, en 2006, Statistique Canada signalait que seulement sept pour cent des Inuits du Labrador utilisaient l’inuktitut comme langue principale à la maison.
« Nous le devons à nos ancêtres et à nos jeunes de trouver un moyen de préserver et de promouvoir notre langue pendant que nous en avons encore le temps », dit-il. Il estime que cela prendra de nombreuses années et exigera des efforts soutenus de la part de tous les Inuits du Labrador, mais il croit que cela peut se faire.
Avant de devenir président, M. Lampe avait déjà entrepris des démarches pour faire en sorte que cela se concrétise. En effet, il a été l’un des premiers partenaires du projet Tradition and Transition Among the Labrador Inuit, financé par le CRSH et mené en collaboration avec la Memorial University et le gouvernement du Nunatsiavut. Le CRSH a accordé une subvention de partenariat de 2,3 millions de dollars à ce projet quinquennal annoncé en octobre 2015.
Résultat immédiat du projet : le 17 mai dernier, le site Web Tradition + Transition a été lancé, en anglais et en inuktitut. Ce site a été créé dans le but de regrouper et de présenter les travaux des chercheurs de la Memorial University et d’autres universités qui étudient le riche patrimoine des Inuits du Labrador.
Le projet fait aussi intervenir les Inuits du Labrador d’une manière jamais vue auparavant. Selon la Memorial University, plus de 30 héritiers de la tradition inuite et chercheurs universitaires de partout en Amérique du Nord travailleront ensemble et échangeront des connaissances sur la culture inuite dans l’espoir de l’aider à s’épanouir. L’équipe de Tradition + Transition consulte la communauté afin de s’assurer que les valeurs inuites sont représentées dans le site Web.
Tom Gordon, professeur émérite à l’école de musique de la Memorial University, dirige le projet. Il a étudié la culture inuite du Labrador de façon approfondie et s’est intéressé tout particulièrement à la découverte de manuscrits de musique classique datant des années 1800 et comportant des annotations en inuktitut.
M. Gordon se souvient d’un déjeuner de travail avec M. Lampe, au cours duquel l’idée de ce projet a germé. « Nous nous sommes demandé, dit-il, ce que l’on obtiendrait en alliant les ressources d’un groupe de chercheurs universitaires enthousiastes avec les connaissances d’aînés dépositaires des expériences de vie de plusieurs générations d’Inuits sur le territoire. La conversation a finalement porté sur la manière dont M. Lampe envisageait le projet. »
M. Gordon croit que le rôle que M. Lampe joue au sein du projet sera appelé à changer, du fait de ses nouvelles fonctions de président du Nunatsiavut.
« Même s’il ne participera plus aux travaux au jour le jour, M. Lampe partage la vision de l’équipe du projet : celle d’un avenir axé sur le savoir pour les habitants du Nunatsiavut, conclut M. Gordon. La revitalisation de la langue et la durabilité de la culture font partie de ses convictions profondes, et il sera certainement un ardent défenseur de tout ce qui peut concourir à la réalisation de ces objectifs. »