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S’attaquer à l’insécurité alimentaire – Il faut plus que des banques alimentaires pour y arriver

Date de publication : 2020-07-14 16:30:00 | Date de modification : 2020-07-14 16:30:00

Comment empêcher que plus de quatre millions de Canadiens et de Canadiennes aient faim? Pour les chercheures Jennifer Brady, Elaine Power et Jennifer Black, qui sont spécialisées en alimentation et santé, les banques alimentaires ne constituent pas à elles seules la solution. Elles jouent certes un rôle crucial en aidant les personnes dans le besoin – surtout dans une période de crise comme celle que nous vivons actuellement avec la pandémie de COVID-19 –, mais d’autres solutions sont nécessaires pour véritablement changer les choses de façon durable, estiment-elles.

Donner une boîte de soupe peut dépanner quelqu’un aujourd’hui, concède Jennifer Black, mais cela ne garantit en rien que cette personne n’aura pas de nouveau besoin d’aide demain.

Le CRSH subventionne les travaux de ces trois chercheures sur l’insécurité alimentaire et ses répercussions sur les collectivités. Toutes trois croient qu’il est temps de s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité alimentaire – à savoir la pauvreté, l’itinérance, le travail précaire, la marginalisation et le filet social inadéquat – pour que la faim puisse être éliminée. Elles poursuivent un même but : que tous et toutes soient en mesure de se nourrir en toute dignité de manière à ce que les banques alimentaires ne soient plus nécessaires.

Un plaidoyer pour le changement

Professeure adjointe en nutrition humaine appliquée à la Mount Saint Vincent University, Jennifer Brady examine comment la formation en plaidoyer des étudiants en diététique pourrait modifier la perception qu’ils auront de leur rôle en matière de justice alimentaire une fois qu’ils exerceront en clinique. Après avoir suivi un cours portant sur la conception d’une campagne de défense des intérêts alimentaires, les étudiants étaient plus confiants et comprenaient mieux comment ils pouvaient aller au-delà des troubles physiologiques et s’attaquer à certaines des causes structurelles de la mauvaise alimentation, dont la pauvreté, la stigmatisation et l’exclusion sociale.

Par son travail d’éducation et de mentorat, Jennifer Brady entend « enseigner à transformer », c’est-à-dire éduquer les étudiants dans tout leur être : il s’agit non seulement de leur permettre d’acquérir des connaissances et des compétences, mais également de faire en sorte qu’ils s’ouvrent au monde et deviennent des citoyens informés, sensibilisés et responsables de leurs actes.

Quand faire le bien est synonyme de division

Elaine Power, professeure adjointe en études sur la santé à la Queen’s University, analyse comment les structures des programmes communautaires d’aide alimentaire peuvent influer sur les causes sous-jacentes de l’insécurité alimentaire.

Selon elle, les programmes qui se contentent de recevoir des dons puis de les acheminer ont tendance à accentuer l’écart entre les personnes qui donnent et celles qui sont aidées. Les banques alimentaires stigmatisent les gens, estime-t-elle. Les programmes qui, outre l’aspect aide alimentaire, réunissent les gens à des fins de collaboration et de plaidoyer en faveur du changement sont ceux qui peuvent faire changer les choses.

Transmettre les bons messages aux enfants

Jennifer Black dirige le groupe de recherche en nutrition urbaine et santé publique de l’University of British Columbia. Le CRSH lui a attribué une subvention d’engagement partenarial afin qu’elle puisse étudier, en partenariat avec le district scolaire de New Westminster, les répercussions qu’aurait un programme universel de repas scolaires à l’échelle du district, dans la foulée d’un projet pilote mené dans trois écoles qui a révélé que, pour les enfants, recevoir de la nourriture signifie que l’on prend soin d’eux.

Par le truchement de programmes ayant trait à l’alimentation, les enfants assimilent également des messages au sujet des valeurs de la société. Les écoles font sans arrêt des collectes de denrées alimentaires, et cela semble être une excellente façon d’enseigner aux enfants le pouvoir du don. Or Mme Black pense que nous leur transmettons des messages contradictoires : d’un côté, nous leur enseignons à faire preuve d’empathie et à prendre soin d’autrui, mais de l’autre, nous semblons les inciter à penser que les banques alimentaires représentent une solution appropriée face à la pauvreté.

Nouvelle ressource

Pour que les enfants voient la faim différemment, Jennifer Black, Jennifer Brady et Elaine Power ont écrit un livre pour enfants sur l’insécurité alimentaire et ses causes profondes. Elles espèrent qu’en amenant les enfants à voir ce qui se cache derrière les banques alimentaires, un débat pourra s’amorcer à partir de la base et déboucher un jour ou l’autre sur des décisions des gouvernements et des responsables des politiques.

Cela prendra du temps, affirme Mme Black, mais si nous commençons maintenant, les enfants d’aujourd’hui exerceront un jour le pouvoir et seront en mesure d’apporter les changements qui rendront les banques alimentaires superflues.

Pour en savoir plus sur les travaux de Jennifer Brady, Elaine Power et Jennifer Black, lire l’article (en anglais) publié dans The Conversation ou consulter leurs pages personnelles : jenniferbrady.ca, @elainepower6, phun.landfood.ubc.ca

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